Le Père Emmanuel d'Alzon

La vocation et l’action du père d’Alzon sont fortement liées à l’environnement politique et social du début du XIXème. Pour contrôler efficacement le pays, et avec la volonté de réorganiser les départements et les diocèses, la Révolution française avait chargé le Clergé d’être, contre rémunération pour cette mission, l’administration religieuse du pays. Mais en gérant le sacré, le pouvoir temporel qui baignait dans une mentalité dominée par la déesse Raison, l'a totalement laminé. Lorsque à son tour Napoléon entreprit de réorganiser les structures étatiques de la France, il créa les préfectures et le code civil, et signa avec Rome le Concordat qui régissait les rapports entre l'Eglise et l'Etat. Il est à noter que c’est à cette époque que l’évêché de Nîmes fut supprimé et rattaché à Avignon.

Les parents de d’Alzon voulait que leur fils fasse des études de droit, mais lui se voyait plutôt militaire, option que son père refusa catégoriquement pensant que c'était là le meilleur moyen pour son fils de perdre la foi. D’Alzon décida alors de devenir prêtre, et ce, à un moment même où l'Eglise catholique était le plus attaquée. Cette vocation a donc une dimension militante, et ce militantisme pour défendre la religion catholique sera une constante dans la vie du Père d’Alzon. Pour lui il s’agira avant tout de couper l’Eglise du pouvoir Politique français (courant gallicaniste) et de la rattacher à Rome (courant ultramontaniste) afin de mettre entre elle et l'Etat la distance nécessaire pour lui garantir l'indépendance.

D'Alzon ira à Rome pour faire ses études, non pas dans une institution mais en chambre avec des théologiens. Lorsqu’il reviendra en France, en homme cultivé, brillant et fortuné, Mgr de Chaffoy, à la tête de l’évêché de Nîmes restauré en 1817, le nommera vicaire général du diocèse, fonction qu’il occupera jusqu’à la fin de sa vie. Cette charge lui permettra de se consacrer à ses oeuvres et d’exercer sa militance autrement qu'en étant curé de paroisse ou prêtre de sacristie. Il créera des réseaux de bienfaiteurs et fondera une maison pour accueillir des orphelins et des jeunes filles. Dans l’âme du père d’Alzon il y a une soif spirituelle intense et un désir de vérité évangélique. Malgré sa fortune et son intelligence brillante, il sera davantage attiré par une vie de prière et de pauvreté, et par la collaboration avec des gens très engagés dans l’Eglise que par les honneurs. Il fera d’ailleurs, le jour où il se rendra compte dans quel état l’ambition des hommes peut mettre l’Eglise, le vœu de refuser à jamais tout dignité ecclésiastique.

La loi Falloux de 1850 permettra à l’Eglise de refaire de l’instruction religieuse dans les écoles, et cette disposition plaira énormément à d’Alzon. Il décide alors de racheter un foyer à Nîmes dans lequel il vivra et où y fera venir d’excellents professeurs qui assureront à la fois l’instruction scolaire et religieuse. Ce foyer appelé "l'Assomption" deviendra très rapidement une école d’élite. Il y fondera l’association de la maison de l’Assomption qui sera le berceau de la Congrégation de l’Assomption. Dans cet environnement il pourra assouvir l'aspect militant de sa foi et former des hommes tant dans leur humanité que dans leur foi. Ce sera un centre de hautes études, un centre d’excellence et de rayonnement intellectuel et religieux.  

(D'après une conférence du Père Maurice LAURENT)